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26 Mai 2025

Ouzbékistan : Sharifa Madrakhimova, lauréate du prix Front Line Defenders, empêchée de quitter l’Ouzbékistan pour assister à la cérémonie de remise du prix à Dublin

Front Line Defenders fait part de ses vives préoccupations concernant la défenseuse des droits humains ouzbèke Sharifa (Sharifakhon) Madrakhimova, lauréate du Prix Front Line Defenders 2025 pour les défenseur⸱ses des droits humains en danger, qui n’a pas été autorisée à se rendre à Dublin pour assister à la cérémonie de remise du prix le 22 mai 2025. Le passeport de la défenseuse des droits humains, qui détenait un visa valide, a été brûlé et invalidé, et son nouveau passeport a été retardé. Front Line Defenders considère qu’il s’agit d’un acte d’intimidation et d’une violation de son droit à la liberté de mouvement, et demande instamment aux autorités ouzbèkes de garantir que Sharifa Madrakhimova puisse voyager en dehors de l’Ouzbékistan pour s’engager avec les partenaires internationaux et les parties prenantes.

Sharifa Madrakhimova est une défenseuse des droits humains, journaliste et leader communautaire ouzbèke originaire de la région de Fergana. En tant que reporter indépendante, elle collabore avec divers médias en Ouzbékistan. Elle est devenue une leader respectée dans la communauté et, inspirée par son talent pour l’écriture, elle s’est fait un nom grâce à son travail de journaliste indépendante, en rendant compte des questions qui touchent sa communauté. Ces sujets comprennent les droits civils et politiques, l’environnement, la responsabilité ainsi que les droits des femmes, des agriculteurs et des personnes en situation de handicap. Sharifa Madrakhimova milite pour le changement social ; elle œuvre pour promouvoir la justice et la prise de décisions équitables par les autorités.

Le 7 mai 2025, Sharifa Madrakhimova a reçu son passeport comportant un tampon de visa irlandais, livré par DHL à son domicile à Kokand, en Ouzbékistan. Cependant, la couverture arrière du passeport, où se trouve la puce biométrique, ainsi que plusieurs autres pages étaient visiblement brûlées. Front Line Defenders pense que son passeport a été brûlé délibérément. La détérioration du passeport a vraisemblablement eu lieu lorsque le colis a été remis à un service de courrier local en Ouzbékistan, juste avant d’être livré. Comme l’enveloppe et le passeport étaient dans un état normal lorsqu’ils ont été envoyés de Dublin, le passeport a dû être retiré du colis pour infliger ce type de dommage. Front Line Defenders pense qu’il a été intercepté au cours de cette dernière partie de la livraison en Ouzbékistan. Le 16 mai 2025, DHL a indiqué à Front Line Defenders avoir ouvert une enquête sur ce problème.

Sharifa Madrakhimova a immédiatement demandé un nouveau passeport dès le 8 mai 2025. Les autorités locales ont affirmé qu’il faudrait au maximum dix jours ouvrables pour recevoir ce nouveau passeport. Les autorités ne l’ont pas autorisée à retirer son nouveau passeport à Tachkent, la capitale, et on lui a dit d’attendre que le document arrive à Kokand le 23 mai par un service de courrier spécial. Le 23 mai, le service de courrier spécial est arrivé avec plusieurs documents de voyage, mais sans celui de Sharifa Madrakhimova. Les autorités locales n’ont fourni aucune explication concernant le statut ou l’endroit où se trouve son passeport.

Sharifa Madrakhimova avait déjà fait l’objet d’intimidations et d’actes de harcèlement de la part de partisans du gouvernement ouzbek. En avril 2024, Sharifa Madrakhimova et une autre défenseuse ouzbèke des droits humains ont été agressées devant leur domicile par un blogueur pro-gouvernement et un autre inconnu. Elle a signalé cette agression à la police, nommant le blogueur comme étant l’un des coupables. Toutefois, les forces de l’ordre ont conclu qu’il n’y avait pas eu de crime. Deux jours plus tard, le blogueur a publié une vidéo diffamatoire à son sujet sur YouTube.

Front Line Defenders exhorte les autorités ouzbèkes à mettre fin aux tactiques d’intimidation contre Sharifa Madrakhimova et à garantir qu’elle ne soit pas empêchée de voyager en dehors de l’Ouzbékistan. L’organisation appelle les autorités à mener immédiatement une enquête impartiale sur la destruction du passeport de Sharifa Madrakhimova, en reconnaissant le lien entre son travail en faveur des droits humains et la destruction de son passeport qui l’a empêchée de recevoir son prix. Les résultats de cette enquête doivent être rendus publics et les responsables doivent rendre des comptes. Front Line Defenders appelle également les autorités ouzbèkes à garantir que tous les défenseur⸱ses des droits humains en Ouzbékistan puissent poursuivre leur travail légitime, y compris le travail de plaidoyer international, sans craindre de représailles ou d’acharnement judiciaire.